LA COLONIE DE VACANCES, Gaîté Lyrique, 06/06/2015 [photo cover: Romain Etienne]
Déjà rentrer dans une (petite) salle, celle de la Gaieté Lyrique, avec 4 (petites) scènes placées en double face à face en mode quadriphonique, chacune portant négligemment un set rock minimaliste mais avec de gros amplis dont les lampes chauffent tranquillement depuis quelques heures, on se dit qu’on va être au chaud…
Les 4 groupes s’installent alors, à la « coul », pendant que nous cherchons le sweet spot au centre de tout ça (près de l’ingé son qui gérera le mix « façade » avec sa tablette pendant tout le concert, c’est mieux). Arrive enfin le chef de cette joyeuse petite bande, j’ai nommé Greg Saunier, leader/batteur foufou fougueux des Deerhoof ! Et là on se dit, ça risque quand même d’être chanmé.
Alors reprenons, à ma gauche, G. Saunier s’associe aux fous furieux de PNEU pour impulser l’ensemble. A ma droite, nous trouvons les sympathiques et néanmoins puissants Papier Tigre. A l’arrière se trouve Marvin (tiens une nana et des synthés au milieu de cette bande de brutes ?). Et pour finir, les discrets, mais bien énervés aussi, Electric Electric forment la 4e arête du carré sonore.
Vidéo de Blue Velvet
Un coup d’oeil du grand blond à la guitare… blonde aux autres participants, et c’est parti mon kiki ! Avec ses motifs de guitare, tantôt enchevêtrés, tantôt se donnant la réplique, en ping pong ou en tournante, et ses batteries-walkyries shootées à l’euphorie, la colonie nous emmène en vacances… pas forcément reposantes. Ca joue fort, ça joue vite, ou plus lentement, mais avec une maîtrise incontestée, à la fois des instruments mais également des compositions. Car il faut les tenir ces partitions, ces breaks syncopés, ces phrases, joués à plusieurs en même temps ou en séquence, hyper précises mais si nonchalamment et avec détermination !
Et tout ce petit monde s’amuse follement, poussant de temps en temps la chansonnette, ou plutôt des « lalala » de grands gamins j’en-foutistes en pleine régression qui donnent à écouter les tripes de leurs instruments, et surtout qui kiffent d’être ensemble, entre eux, avec nous, là maintenant, pour nous faire perdre la boussole.
Et c’est bien ce qu’il se passe. Quadriphonie oblige, on est perdu et on aime ça… ou pas. On aimerait pouvoir tous les voir jouer, mais on doit tourner la tête dans tous les sens, ce qui est un peu fatiguant à la longue et nous oblige à choisir une paire de groupes du coup. Et surtout les oreilles n’en réchappent jamais ! Pas moyen de trouver un angle où les tympans seront moins molestés. Bref, les morceaux durent de 10 à 25 mn à vue de nez, et le concert à peu près 1h20 rappel compris, ce qui est bien assez.
Car après un long morceau genre drone d’abeilles où toutes les fréquences semblent conviées simultanément, pendant lequel la salle est plongée dans le noir avec pour seul éclairage une lanterne suspendue au milieu qu’un type fait se balancer en tirant sur une longue corde, tel le moine dans son clocher, nous sommes rincés, sur les rotules, abasourdis, désemparés, vidés et les bouchons d’oreilles en sang, mais heureux, béats, amorphes, conquis.
Et eux tout aussi lessivés mais heureux derrière leurs instruments de l’enfer, semblent pourtant en redemander encore… Alors on se dit (tous) : à quand les prochaines vacances ? »